Le TTIP ( Transatlantic Trade and Investment Partnership) verra-t-il enfin le jour? Après des négociations houleuses fin avril entre les partenaires Américains et Européens, la signature rapide d’un accord de libre-échange semble de plus en plus compromise. Et pourtant, le président Barack Obama, très impliqué dans ce projet d’échanges transatlantiques souhaitait finaliser les discussions dès la fin 2016 (et donc celle de son mandat). Mais pourquoi ces accords n’aboutissent-ils pas ?
Le TTIP, un projet de partenariat décisif
Depuis 2013, l’UE et les USA se sont engagés dans la négociation d’un partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement baptisé TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership). Dans ce projet, les discussions s’articulent autour de quatre thèmes phares :
- L’accès des entreprises aux marchés, moins dépendant de l’élimination des droits de douane (très réduits) que de l’ouverture des commandes publiques
- La forte réduction des obstacles non tarifaires et la reconnaissance mutuelle des procédures de régulation
- La protection de la propriété intellectuelle, des appellations d’origine et indications géographiques de provenance
- Le régime des investissements et le mode de règlement des conflits entre les entreprises et les Etats
La projection de ce grand marché transatlantique apparaît donc comme une avancée décisive et très positive pour l’Europe. En créant un nouvel espace économique de part et d’autre de l’Atlantique, le TTIP pourrait rassembler les 820 millions de consommateurs les plus riches et couvrir ainsi près de 40 % du PIB et le 1/3 du commerce mondial. En favorisant la libéralisation des échanges entre les USA, le premier partenaire de l’Europe, et l’Union, deuxième partenaire des USA, l’alliance économique pourrait non seulement insuffler 0,5 % de croissance supplémentaire, mais aussi créer plusieurs millions d’emplois et engendrer une hausse des salaires, notamment en Europe. Bref, le Vieux Continent tout comme les USA bénéficieraient de cette réciprocité économique démultiplée.
Des négociations mal parties
Malheureusement les dernières négociations semblent mal parties malgré le volontarisme et l’engagement démontrés par la président Obama. Aujourd’hui et à ce stade des négociations, la France dit non au projet. Fin avril, le président Hollande déclarait à cet égard: »Nous ne sommes pas pour le libre-échange sans règle. Jamais nous n’accepterons la mise en cause des principes essentiels pour notre agriculture, notre culture, pour la réciprocité pour l’accès aux marchés publics». Mettant l’accent sur l’état d’esprit conquérant des USA, Mattias Fekl semblait annoncer le refus de la France dans ces négociations. Une mise à distance confirmée par Edgar Allen du Council on Foreign Relations de Washington: « Les deux parties sont encore très éloignées l’une de l’autre dans les négociations et des questions centrales restent en suspens».
Les points de divergence entre les partenaires
Voici les principaux points de divergence entre les partenaires :
- L’accès aux marchés publics américains, verrouillés par le Buy-American Act, datant de 1933, et le Small-Business Act
- La gestion des services publics en Europe
- Le respect des normes sanitaires, sociales et environnementales
- L’étendue des droits sur la propriété intellectuelle, principalement dans les domaines de la santé et de l’agriculture
- Le recours à l’arbitrage ou à des juridictions spécialisées pour trancher les contentieux entre les entreprises et les Etats
- Les conséquences de la surveillance numérique planétaire mise en place par la NSA
- La mise en coupe réglée des banques internationales par le Trésor et les régulateurs américains
- L’impérialisme de l’appareil judiciaire américain
- La domination de l’économie numérique par l’oligopole des Gafam (une menace pour la concurrence comme pour les libertés publiques car elle reconnaît le droit de transférer et s’approprier des données personnelles)
Si une volonté commune semble animer les partenaires Européens et Américains à éliminer leurs barrières douanières et règlementaires, ce 13ème round de discussions semble toutefois mettre à jour un certain agacement européen face au refus américain d’ouvrir à la concurrence ses marchés publics, notamment locaux. Les élections américaines et les réflexes protectionnistes qu’elles amènent, ne viendront-ils pas entamer des accords déjà fortement fragilisés ?